lundi 14 juin 2010

SUR LA VOIE DU DIABLE










toutes les images offertes grâce à la générosité du web google
posséde en leur nommination le mot diable

dans quelques temps vous découvrirez la visite de monsieur souche à la grotte du diable alors c'est une mise en bouche la la voie du diable

bonne semaine chers lecteurs, chères lectrices les assidues POMME , COCO, MARIA , SOPHIE, MARTINE.


Jean sans Peur revenait de guerre, sac à l’épaule, canne au poing, manteau fané, bottes trouées. Un soir venteux sur son chemin, merci Dieu, enfin un village. Maisons basses, fumiers bourbeux. Un chien vint lui gronder autour. Une vieille, devant sa porte, balayait quelques rats crevés. Elle râlait dur.

- Salut grand-mère ! Y a-t-il une auberge où loger ?

- Une auberge, ici ? Ah, misère !

Elle ricana, torcha son nez. Elle lui désigna la colline.

- Nous avons bien ce vieux château, mais il n’y fait pas bon dormir. Le diable y vient, à ce qu’on dit. Ceux qui ont risqué leur carcasse entre leurs toiles d’araignées sont tous morts d’épouvante pâle.

- Hé, qu’importe, ma bonne mère ! Pourquoi crois-tu qu’on m’appelait, dans mon régiment, Jean sans Peur ? J’y roupillerai comme un loir !

Il grimpa jusqu’à la bâtisse, il poussa le portail plaintif, fit sonner son pas sur les dalles d’une salle aux meubles moisis. Il faisait froid. Il alluma un grand feu dans la cheminée, s’y chauffa les pieds et les mains, puis sortit ses trois dés d’ivoire et se mit à jouer tout seul.



Il les lança sous la chandelle. Ils roulèrent. Un bras pâlichon tomba, badaboum, du plafond, de l’autre côté de la table, puis un deuxième, puis deux jambes. Jean, rigolard, leva le nez.

- Hé, là-haut, merci pour les quilles ! Manque la boule, envoyez-la !

Une tête dégringola, rebondit sur les quatre membres. Tourbillon de pieds et de mains. Un petit bonhomme apparut, regard torve, barbe pointue, cheveux plantés en balai-brosse. C’était le diable. Il dit :

- Bonsoir.

- Salut à toi, répondit Jean. Grand merci pour la compagnie. Si nous jouions une partie ?

Il lui fit un clin d’œil canaille.

- Bien volontiers.

- A toi l’honneur.

Le diable agrippa les trois dés, souffla dessus, les fit rouler. Le premier tomba sous la table.

- Ramasse, dit le malotru.

- Fais-le toi-même, hé, peau de bouc, je ne suis pas ton domestique !

Le diable recula sa chaise, il ronchonna, il se baissa. Alors Jean empoigna sa canne, et à deux poings, coup droit, revers, il l’abattit sur le mauvais, sur son crâne, son dos, ses fesses.

- Tu croyais rouler Jean sans Peur ? Que lui veux-tu, à ce château ? Hé, pet de Dieu, avoue, sinon je te hache en purée de viande !

- Yayay, pitié, je meurs, arrête, assez, drapeau blanc, je dis tout ! Suis-moi. Promets, ne tape plus !

Il s’en fut trottant, trébuchant, le dos courbe, en tenant ses reins. Jean le suivit, le bâton haut. La cheminée. Au fond de l’âtre, un placard déguisé en mur. Ouverture. Des pièces d’or ruisselèrent en flot cliquetant jusqu’au beau milieu de la salle.

- C’est ma réserve, dit le diable. L’or me sert à pourrir les gens. Pour une poignée de ces sous, ils me laissent prendre leur âme. La tienne ? Non, je n’en veux pas. Que veux-tu, je suis peu de chose. Mon seul pouvoir est d’effrayer. Là est ma gloire et ma puissance. Qui me regarde sans effroi voit ce que je suis, rien de plus : un petit bonhomme flapi. Prends ce que tu veux et va t’en. Moi, salut, je vais me coucher.

Il s’en fut. L’ombre l’effaça. Jean emplit son sac à ras bord et s’en fit un bel oreiller.



Le lendemain de bon matin il remit sous ses pieds la route. Après douze jours de bon vent la capitale du royaume lui vint devant. Le glas sonnait à tous les clochers de la ville. Il pleuvait des larmes partout. On sanglotait dans les mouchoirs, on voilait de deuil les façades, on s’agenouillait dans les rues, on appelait Dieu au secours. Jean s’informa.

- Qu’est-ce qu’il se passe ?

- La fille du roi, lui dit-on. Elle doit être livrée au diable. Une fois par an, c’est ainsi, une pucelle doit payer la tranquillité du pays. Cette année, malheur sur nos vies, c’est notre princesse Lison qui a tiré la paille courte. Regardez-la, comme elle est belle ! Avec quel courage elle s’en va !

Une jeune fille pieds nus, couronne fleurie, robe blanche, entre deux haies de cris félés, de gémissements, de murmures, descendait la rue vers le fleuve où l’attendait un bateau noir. Jean accourut à son côté.

- Je vous accompagne, dit-il.

- Inutile, c’est sans espoir.

- Que nous importe, allons toujours !

Sur le rivage, plus personne, sauf le diable qui descendait la passerelle du bateau pour accueillir son beau cadeau. Il aperçut Jean.

- Aïe, malheur ! Encore toi ? Je suis maudit !

- Tout juste, mon beau. Tu décampes, et tu ne reviens plus ici, sinon je dis à tout le monde que tu n’es qu’un loup de papier !

- C’est d’accord, ne t’énerve pas.

Le diable hissa la voile en hâte. Retour triomphal au palais.



Le roi invita le sauveur de sa Lison à déjeuner.

- Ainsi donc, surprenant jeune homme, vous ne connaissez pas la peur.

- Non, majesté. Je le regrette. J’aimerais bien la rencontrer pour voir quelle tête elle me fait.

- Attendez le dessert, mon cher.

Fin du repas. Gâteau-surprise.

- Découpez-le, mon bon ami, dit la princesse à son voisin.

Son voisin, c’était Jean, bien sûr. Comme il avançait le couteau, la montagne de chantilly s’ouvrit soudain, deux oiseaux blancs en jaillirent et s’envolèrent au nez du sauveur ébahi. Il sursauta, cria :

- Holà !

- Vous avez eu peur, dit le roi.

- J’avoue. Merci, c’est délicieux.

Jean sans Peur épousa Lison, inutile de vous le dire. Elle l’effraya, de temps en temps. Mais l’amour seul parvint à faire ce que le diable n’avait pu.



(Henri Gougaud, Le livre des chemins)

2 commentaires:

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